NOM DU PROGRAMME : EA numéro / pays / crise
Site du Programme
Dates couvertes : 10 Octobre 2016
Numéro de SITREP 6
Soumis par : Equipe d’urgence de Caritas Haïti
1• Résumé
L’ouragan quitte définitivement Haïti mais les conséquences sont très sévères. Les faits suivants sont à retenir :
• Plus de 800 morts d’ après les données du terrain même si le gouvernement ne dise que 271
• Plus de 1 million de personnes sont en situation d’assistance humanitaire
• OCHA lance un flash appeal aux organisations internationales pour un montant de 119 millions de dollars américains
• L’école a repris au niveau de Port-au-Prince
2 • Données clés sur l’événement et sur populations touchées
Le cyclone Matthew a été formé le 29 Septembre 2016 passé dans l’océan atlantique et il s’est rapidement transformé en ouragan. Dans la nuit du 03 au 04 Octobre 2016, il a frappé les côtes du Sud, de la Grand’ Anse, des Nippes et du Sud-est. Le 04 Octobre, il a touché le Nord’ Ouest. Le 05 Octobre 2016, l’ouragan a laissé les cotes d’Haïti et ne représente plus un danger pour le pays
Département Dégâts enregistrés
Grand’ Anse • 445 morts
Sud • 284 morts, 35389 personnes déplacées et vivant en abris
Nippes • 32morts, 18 blesses, 3247 maisons détruites, 6813 maisons endommagées, 5190 maisons inondées, 21154 déplacés, 3640 familles sinistrées
Sud-est • 6 morts
Nord’ Ouest • 1 mort, 388 déplacées
Ouest • 34 morts, 3877 déplacées
Artibonite • 3 morts, 2 disparus, 545 sinistrés
3 • Sécurité / Situation politique
Les scènes de pillage continuent sur les convois et la Police Nationale demande à ce que les containers soient acheminés sous escorte policière.
4 • Dispositions prises/Actions menées
• Le gouvernement déclare que le pays est en situation d’urgence humanitaire
• Besoins urgents au niveau des abris provisoires
• Des missions héliportées ont été effectuées dans la Grand-Anse. Les photographies montrent l’ampleur des dégâts
• L’Organisme de Coordination des Actions Humanitaires (OCHA) a lancé un appel éclair (flash appeal) pour un montant de 119 millions de dollars
• Le gouvernement veut coordonner l’aide humanitaire et il exige que tous les organismes humanitaires envoient leur plan d’action au ministère de la planification et de la Coopération Externe pour que les actions soient mieux ordonnées
• Un appel d’Urgence est lance par OCHA pour répondre aux besoins humanitaires immédiats des Urgences de l’Ouragan Matthew.
Les Cayes
Plus de trois cents (300) sacs de riz, des sacs de Haricot, de mais moulu et autres matériels sont distribués par Caritas avec Food For the Poor
Les Nippes
Nippes participa à l’évaluation des dégâts avec les membres du COUD. L’accompagnement des personnes en abri provisoire continue.
La solidarité locale continue et Caritas Nippes a procédé aujourd’hui à la distribution de 10 paquets d’eau et de 10 caisses de soda à Petite Rivière
Jacmel
Les activités de clinique continuent. Mais Jacmel sollicite un appui.
Jérémie
Les dernières images de la grand’ anse sont très tristes. Plus de 400 morts sont déjà enregistrés tandis que certains endroits sont encore inaccessibles. Des produits alimentaires sont transportés par voies maritime et aérienne. Le centre de PRED a été affecté en partie. Le Directeur de la Caritas Diocésaine sollicite des Tronçonneuses du BN en vue de gérer les arbres qui jonchent les terres et préparer la prochaine période de plantation.
Port-de-Paix
500 familles ont reçu des kits alimentaires à Baie de Henne
Visite dans le Sud du DG de Caritas Haiti : « Tandé ak Wè se de ! »
Ce que nous avons vu en visitant le Sud et la Grand-Anse dépasse largement ce que nous avons entendu. Les régions de Petit-Goâve et de Vialet ont été frappées. La ville de Miragoane a subi des dégâts. Mais il fallait aller dans les périphéries pour voir les dégâts les plus importants. De Aquin vers Saint Saint Louis du Sud, on a l’impression qu’un vent violent avait soufflé, avec des dégâts, surtout au niveau des arbres. C’est à Cavaillon que la situation commence à inquiéter.
J’ai vu tard dans l’après-midi, des équipes qui s’affairaient pour déblayer les rues remplies de boue. La rivière de cavaillon a inondé toute la ville pendant que des très violents saccageaient la ville. Les gens voyaient passer des animaux, des arbres, des matériels de maison, et aussi des personnes. Seulement au niveau de cette commune, 12 personnes ont été tuées et 24, portées disparues. Dans les journées du samedi 8 et du dimanche 9 octobre, des corps ont été retrouvés sous la boue. Plusieurs maisons sont détruites et les familles ont perdu beaucoup d’objets car ne s’attendant pas à un tel niveau d’eau dans la ville. Pour un membre de la communauté, la ville a vécu un véritable cauchemar pendant 12 heures.
En laissant Cavaillon, nous avons commence à nous rendre compte de l’ampleur des dégâts : Route effondrée, pylônes électriques couchées dans toutes les directions, des arbres déracinés, des maisons emportées et les familles essayaient au bord de la route de sécher ce que Matthew n’a pas emporté. La situation devient encore plus grave en rentrant aux Cayes. Le pire commence après avoir traversé le pont de La Ravine vers Torbeck et la zone côtière : une vision vers la mer, jusqu’à l’ile à vache ; des arbres couchés dans toutes les directions, le très très peu qui reste encore debout a perdu toutes feuilles et branches, des maisons et des écoles sans toiture ou à plat ; d’autres en béton recouvertes d’arbres, une route occupée à moitié par des passants et l’autre par des branches ; des églises avec des toitures effondrées ou emportées ; des usines et des pompes à essence sans couverture ; des maisons dont les propriétaires ont beaucoup de mal à sortir, car environnées d’arbres partout ; des terres lavées et vides, à perte de vue par endroit. Et à aucun endroit, nous n’avons remarqué ce qui pourrait constituer un espoir de récolte dans les prochains 3mois. Tout a été lavé et les animaux domestiques ou de bétail ont été très rares dans les zones jadis fréquentées.
Sur la route de Jérémie, notre premier étonnement a été Laborde et Cam-Perrin. Zone jadis cachées par des arbres, il n’y a rien qui fait encore la fierté de la zone : les arbres sont en lambeaux, les maisons encore plus. De Duchity jusqu’à Beaumont, une question occupait mon esprit. Et aujourd’hui encore, je n’ai pas la réponse. « Y-avait-il un cyclone ou une tornade ? » Toutes les maisons en tôle qui bornent la route ont perdu leur toit ou sont réduites en amas de débris. Même le Commissariat de Duchity, fraichement rénové, en a fait les frais. Des personnes interrogées affirment avoir vu des cocotiers entiers qui passaient tournant comme une roue. À certains endroits, on a l’impression qu’une explosion a eu lieu. Et la ville de Beaumont en est une bonne illustration. Et à ces niveaux de la route, il n’y pas d’eau, pas de nourriture, pas de moyens d’approvisionnement, et une agressivité qui se développait par rapport aux voitures qui passaient.
Le tableau ne changea pas vraiment jusqu’à Roseaux. Mais la plaine de Gomier qui longe le littoral avec des maisons en chaume et tôles, est violemment saccagée. Et à partir de Carrefour Léon, on se sent effectivement en face d’une catastrophe. Jérémie et ses environs sont détruits. Et les mots ne suffisent pas pour traduire ce qui traverse quelqu’un qui arrive dans ce coin jadis recouvert au niveau végétal.
Les dégâts sont énormes. J’ai vu des maisons délabrées, des rues obstruées de débris sous lesquels peuvent se cacher des corps. J’ai rencontré des personnes qui ne se sont pas encore remise de l’émotion, comme si elles se demandaient encore si c’est réel. J’ai rencontré à l’Hôpital de Jérémie des médecins dépassés, au visage fatigué quoiqu’ayant une allure de guerrier. J’ai rencontré des prêtres autour de leur Évêque à l’évêché, arrivés abasourdis pour l’informer de ce qu’ils ont vécu avec leurs fidèles au cours de ce désastre au cours duquel ils ont frôlé la mort. D’autres sont encore sous le choc pour apprendre que les villes de Dame-Marie, Anse-d’Hainault, les Irois et Carcasse sont presque inexistantes, quoique les équipes de l’évaluation n’arrivent pas encore à y avoir accès. J’ai vu des hélicos sillonner le ciel de la Grand-Anse et du Sud pour rapporter des nouvelles qui ne plaisent pas. J’ai vu aussi des expatriés et des journalistes à l’affut d’informations de toute part. J’ai vu un peuple avec les yeux ouverts feignant de ne pas voir la situation dans laquelle il patauge afin de mieux se préparer à ce qui l’attend.
En fait, ce qui se vit actuellement dans le grand Sud, c’une catastrophe non seulement humanitaire, mais aussi écologique. La région a perdu sa couverture végétale qui constituait une ressource importante pour le pays. Le parc Macaya a été ravagé et les différentes espèces d’animaux et plantes rares sont en danger. La situation économique du pays n’était pas à un niveau satisfaisant. Cela risque de s’empirer dans les prochains mois.
« Des forces de vie ! »
En dépit de tout, dans le Sud comme dans la Grand-Anse, nous avons rencontré un peuple qui tombe, comme un enfant de trois mois, et qui cherche à se relever.
• La solidarité locale s’organise ; on se partage le peu qu’on a. Et on s’allie pour réaliser certains travaux. Des personnes de Port-au-Prince ou d’autres endroits organisent des collectes de dons en nature pour aller appuyer les victimes sur la côte sud et Jérémie.
• Des premières évaluations sont réalisées par des volontaires
• Des jeunes ont déblayé les routes à certains endroits pour faciliter la circulation et le passage des convois
• Des familles sinistrées se sont construit des tonnelles, pour se protéger et passer la nuit.
• Ceux qui le peuvent commencent à remettre leur maison en état de les accueillir (réparation des toitures).
• Un groupe de jeune passe de maison en maison pour relever les arbres déracinés avec une voiture et les attacher avec des cordes et des piquets. Ils entendent étendre la dynamique à d’autres communautés
• Des paysans commencent déjà à revaloriser leur terre
• En dépit de la situation catastrophique où il se trouve, l’haïtien garde son sourire, signe d’espoir en des jours meilleurs.
« Mes inquiétudes »
• Les arbres abattus et la brousse des périphéries de Jérémie étaient déjà très sec le samedi 8 octobre, quatre jours après le cyclone. Le peu d’arbre encore debout ne donne pas vraiment bonne impression. Et le soleil commence déjà à frapper fort. Nous craignons une sévère sécheresse pour les jours, mois à venir. Et aussi, aujourd’hui, des risques d’incendie sont à redouter dans certaines zones de la Grand-Anse.
• La communauté internationale est très active dans le Grand-Sud. La distribution des produits alimentaires s’intensifie. Jusques à quand pourra-t-on tenir ? Les communautés du Sud, de la Grand-Anse, du Sud-Est et du Nord-Ouest, ne seront-ils pas en situation d’insécurité alimentaire avancée ?
• Avec les dégâts dans les infrastructures sanitaires, la gestion des déchets, les abris provisoires, les pénuries et les nouvelles donnes apportées par cette nouvelle catastrophe, la recrudescence des épidémies n’est-elle pas imminente en Haiti ?
• Comment faire face aux animaux morts qui sont dans les débris et qui commencent à entrer en putréfaction ? Il en est de même des personnes portées disparues.
• Les stratégies de distribution de l’aide alimentaire en Haiti ne donnera-t-elle pas lieu à des émeutes ? car déjà, des routes commencent à être bloquées, des camions stoppés par des individus qui se disent aussi victimes de Matthew et qui ne supportent pas que des convois passent sans qu’une miette ne leur soit parvenue, alors que leur communauté est aussi dans le besoin.
• Le tableau des Cayes et de Jérémie ressemble déjà beaucoup à celui de Port-au-Prince après le tremblement de terre du 12 janvier 2010. Va-t-on avoir la même situation pour produire le même résultat ?
« Ce que nous n’avions pas prévu »
Les acteurs au niveau local se sont exprimés sur les stratégies espérées pour la gestion de cette urgence (RR et Réhabilitation) pour tous les concernés :
• Les arbres qui jonchent le sol sont tellement en quantité que les familles seules ne pourront pas dégager tout ce qui encombre leur cour. Des équipes devront être mises sur pied pour suppléer le besoin se fait sentir. Les Directeurs des Cayes et de Jérémie insistent sur la nécessité de disposer d’un certain nombre de tronçonneuses dans les diocèses à cet effet.
• Généralement, nous avons deux phases dans la gestion des urgences : la réponse rapide et la réhabilitation. Beaucoup d’acteurs locaux rencontrés parlent de la nécessité de conduire les deux étapes en alternance : Pourvoir aux besoins des populations en produits alimentaires et autres et aussi préparer la prochaine saison agricole. La paroisse de Lagaudray dans la plaine de Torbeck parle d’un grand besoin en motoculteurs et d’intrants agricoles de manière rapide pour éviter de rater le mois d’octobre qui est une époque de plantation. Sinon, la famine frappera les communautés en janvier.
• La Caritas des Cayes est déjà abordée par certaines paroisses pour pourvoir à leurs besoins Tôles, bois et clous pour réparer le toit des maisons. Mieux vaut penser à une solution définitive que du provisoire (avec des bâches) qui peut devenir permanent.
• Les paysans ne disposent d’aucune semence pour lancer la prochaine saison de semis.
Autant d’éléments qui interpellent et qui traduisent déjà la situation dans laquelle va se trouver le pays dans les prochains mois. Des photos sont attachées à ce message.
5 • Coordination et réunions
Pas de rencontre externe pour Caritas en cette journée.
6 • Médias & Communications
Tous les médias sont maintenant concentrés sur la réponse à apporter et sur la nécessité que l’aide soit coordonnée
7 • Personnel
• On a pu entrer en contact avec le point focal urgence à Jérémie qui a utilisé un téléphone Satellite. La communication se rétablit petit à petit avec la Grand’ anse
• Un groupe constitué d’anciens cadres de Caritas veulent se porter volontaire pour appuyer les prochaines réponses
8 • Activités prévues pour la prochaine journée
• Caritas Cap Haïtien entend apporter son soutien aux dioceses victimes
• Réunion avec la Mutuelle Tet Ansanm pour la constitution d’un groupe de volontaire à mobiliser dans le cadre de la préparation et la distribution des kits
• Le Bureau National de Caritas Haiti se mobiliser pour la mise en œuvre des actions de RR.
Duchity
Cathedrale St Louis de Jeremie